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Monsieur Marcos à Washington en 1983 (photo libre de droits d'auteur)

Monsieur Marcos à Washington en 1983 (photo libre de droits d'auteur)

1981 voit le début du déclin de la santé de Monsieur Marcos et, parallèlement, l'accroissement du pouvoir de l'ombre de son ambitieuse épouse, Imelda. Les années qui suivent, M. Marcos s'absente de plus en plus souvent pour se faire soigner sans qu'il veille à se faire vraiment remplacer à la tête de l'état. Certains commencent à se demander s'il est encore réellement à même de diriger le pays.

 

Dans ce contexte, en août 1983, le leader de l'opposition, Benigno Aquino Jr., rentre au pays après trois années d'exil passées aux Etats-Unis pour échapper à la répression du tyran. Des tueurs embusqués à l'aéroport tirent sur lui et sa famille, l'abattant sur le coup et blessant son fils, le Président actuel (qui garde encore aujourd'hui une balle logée dans son corps). L'opposition n'hésite pas à blâmer M. Marcos en personne pour ce lâche assassinat, tandis que d'autres en coulisse pointent vers Mme. Marcos et les militaires. Trois spéculations circulent parmi la population : la première met en cause le Président Marcos lui-même à travers son chef militaire de confiance, Fabian Ver, la seconde vise Imelda Marcos avec ses propres brulantes ambitions, à présent que le pouvoir de son mari semble s'affaiblir, quant à la troisième, elle se tourne vers Danding Cojuangco qui aurait planifié l'assassinat pour satisfaire ses propres ambitions politiques. L’acquittement en 1985, à l'issue de leur procès, du Chef d'Etat-Major Fabian Ver et d'autres militaires haut-gradés est largement regardé à l'époque comme de la poudre aux yeux et une parodie de justice. Quoiqu'il en soit, cet événement marque le début du déclin du pouvoir de Marcos.

 

Dès 1984, Ronald Reagan, alors Président des USA, commence à prendre ses distances par rapport au dictateur dont la santé se détériore rapidement.

 

Le 13 août 1985, 56 parlementaires signent une résolution appelant à entamer une procédure d'empêchement contre le Président pour détournement de fonds d'aides américaines à des fins personnelles. Cette résolution s'appuie sur un article d'un journal américain, le San Jose Mercury News, qui dévoile les investissements financiers et les holdings immobiliers détenus par le clan Marcos essentiellement aux USA et qui se comptent en dizaines de millions de dollars. Cette tentative rencontre toutefois peu de succès auprès du comité chargé de l'examiner, qui ne recommande donc pas la procédure d'empêchement. De ce fait, l'élan pour destituer le Président Marcos par la voie d'un procédé constitutionnel fait rapidement long feu.

 

Toutefois, fin 1985, face à un mécontentement public croissant et sous la pression de ses alliés étrangers, alors qu'il reste plus d'une année à son mandat, Marcos convoque des élections anticipées. Ce faisant, il table sur la division de ses opposants, croyant qu'ils ne pourront jamais s'entendre en très peu de temps pour lui opposer un candidat susceptible de lui faire de l'ombre. Il choisit Arturo Tolentino comme co-listier pour la vice-présidence. Contre toute attente, l'opposition parvient à rassembler un large consensus autour de la personne de Corazon Aquino, veuve de Benigno Aquino Jr. Madame Aquino refuse dans un premier temps cette lourde responsabilité, mais face à la pression populaire manifestée sous forme d'une pétition rassemblant plus d'un million de signatures, elle finit par céder. Les élections se tiennent le 7 février 1986. C'est un échec. La commission électorale officielle (COMELEC) déclare M. Marcos vainqueur alors que le Mouvement National pour des Elections Libres, officiellement accrédité comme observateur, proclame la victoire du tandem de Madame Aquino. En fait, des tricheries sont rapportées de la part des deux clans et l'on fait état de nombreuses violences et de falsifications de résultats.

 

Ces élections ratées donnent un coup de pousse décisif au "People Power Movement" (Mouvement du Pouvoir au Peuple). Mais Marcos n'est pas prêt à s'avouer vaincu et, par la suite, prétendra toujours qu'il avait été dûment élu et proclamé Président pour un 4e terme, mais injustement et illégalement privé de son droit d'exercer sa fonction.

 

Quelques jours avant la prestation de serment, un complot visant à assassiner Marcos est mis au jour. Les conjurés se réfugient alors dans un bâtiment longeant l'avenue Epifanio de los Santos (plus connue sous son accronyme EDSA). Sur ordre du Président, l'armée s'apprête à donner l'assaut, mais la population afflue en nombre tandis que l'archevêque de Manille multiplie à la radio des appels à soutenir le mouvement populaire. Les chefs des forces armées tergiversent et, finalement, devant la foule de plus en plus compacte qui se masse sur l'avenue et dans les quartiers avoisinants, se rangent du côté des insurgés.

 

Fort de sa prétendue victoire, le 25 février 1986, chaque clan procède à l'investiture de son Président. Cependant, Monsieur Marcos hésite quant à l'attitude à adopter face à la révolte qui gronde. Il consulte ceux à qui il peut encore faire confiance, appelle le sénateur américain Paul Laxalt, demandant l'avis de la Maison Blanche. A Laxalt qui lui conseille "de couper et de couper proprement", il exprime son désappointement. Constatant qu'il est lâché de toutes parts, dans l'après-midi, Marcos demande à son Ministre de la Défense, Juan Ponce Enrile, devenu un des leader de l'opposition avec le Général Fidel Ramos, un sauf-conduit pour sa famille, lui-même et une poignée de personnes qui lui sont restées fidèles tel que le Général Ver. A 21 h, quatre hélicoptères emmènent les fugitifs à Clark Air Force Base, à quelques 80 km au nord de la capitale. De là, des C-130 de l'armée US les emmènent d'abord à Guam, puis à Hawaii.

 

L'histoire retiendra cette journée du 25 février 1986 et les quelques jours qui l'on précédée comme la "EDSA Revolution" ou "EDSA People Power Revolution".  Ce qui en fait sa grandeur, c'est que pas un seul coup de feu ne fut tiré.  Elle inspirera plusieurs mouvements de libération et révolutions ultérieurs.

 

En envahissant le palais présidentiel après le départ de ses occupants, les insurgés découvrirent les 2.700 paires de chaussures que Mme. Marcos avait abandonnées derrière elle. Il faut dire que c'était bien peu de choses au regard des paquets d'or et des bijoux que les Marcos avaient emportés ce jour-là cachés dans leurs bagages.

 

Ferdinand Marcos mourut à Honolulu le 28 septembre 1989 des suites d'une maladie des reins, du coeur et des poumons. Il fut d'abord enterré dans un mausolée privé sur l'île d'Oahu. Plus tard, sa famille rapatria sa dépouille pour la faire reposer dans une crypte réfrigérée située quelque part dans la province d'Ilocos Norte, tout au nord de l'île de Luzon. Son fils et sa fille, qui sont parvenus à se faire une place en politique depuis leur retour au pays, ne manquent pas d'y entretenir son souvenir.

 

 

Tag(s) : #Histoire - géographie
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